Une motion UDC entraînera une hausse des loyers abordables en cas de travaux. La 13e rente AVS fi nira-t-elle dans les poches des investisseurs immobiliers?
Au mois de novembre 2024, les Vaudoises et les Vaudois ont balayé les attaques des milieux immobiliers, conscients du fait que faciliter les résiliations n’avait d’autre but que de permettre une augmentation massive des loyers au changement de locataires. Les résultats de cette votation fédérale ont mis en lumière le fossé qui se creuse entre une population aux prises avec des difficultés croissantes et un Parlement complètement déconnecté de la réalité. Dans le canton de Vaud, le pouvoir législatif vaudois, donnant suite à une motion du député UDC Philippe Jobin, s’en prend à la loi cantonale qui encadre les loyers après travaux, un texte qui protège les locataires contre des hausses abusives à la suite de rénovations. Pour rappel, la loi sur la préservation et la promotion du parc locatif (LPPPL) avait été largement acceptée en votation en 2017, malgré une farouche opposition des acteurs de l’immobilier.
Des loyers neufs pour de vieux logements
Le Grand Conseil a donc faite sienne la charge menée par le lobby immobilier qui demande de modifi er la LPPPL pour y inscrire un seuil minimum de loyer après travaux. Ce plancher est fixé selon le barème des Logements à loyer abordable (LLA) établi pour des logements neufs. Conscient de l’absurdité d’appliquer un tel niveau de loyer à des habitations anciennes peu entretenues, le Conseil d’Etat a élaboré un contre-projet qui prend en compte la vétusté de la bâtisse, mais qui conduit encore à renchérir massivement les loyers en regard du droit actuel. Selon le rapport du Conseil d’Etat, pour un vieux logement de 75 mètres carrés loué 1100 francs par mois, des travaux d’entretien et de rénovation entraînent une hausse de loyer de 175 francs par mois avec la loi actuelle, qui empêche les rendements excessifs. Tandis que selon la motion Jobin l’augmentation serait portée à 494 francs, alors que le contre-projet du Conseil d’Etat la fi xerait à 418 francs par mois. Par rapport à la situation actuelle, la proposition du Conseil d’Etat conduirait donc à un surcoût annuel de 2916 francs (3828 francs avec la motion Jobin).
Moins de retraites, plus de dividendes
Dans la mesure où les appartements concernés sont souvent habités par des personnes à la retraite, il est intéressant de tirer un parallèle entre ces augmentations de loyer et le niveau des rentes AVS. En 2022, selon l’OFS, la rente mensuelle moyenne s’élevait à
1810 francs. Alors que les personnes retraitées voient leurs conditions de vie péjorées d’année en année, elles devront consacrer au minimum plus d’une rente et demie au paiement de la hausse de loyer supplémentaire dans le cas où le contre-projet serait accepté, et plus de deux rentes mensuelles dans le cadre de la motion Jobin. Si la récente 13e rente AVS arrachée de haute lutte par le peuple suisse pouvait laisser entrevoir un certain répit – son entrée en vigueur prévue en 2026 – cet espoir pourrait être rapidement douché pour une partie de nos aîné-e-s. Ils et elles retrouveront même contraints de consacrer tout ou partie de la 12e rente au paiement de la rémunération d’investisseurs immobiliers. Mépris de la volonté populaire En s’attaquant par la bande à une loi acceptée par le peuple pour servir les intérêts de quelques grandes sociétés immobilières, la majorité de nos élu-e-s ne fait pas qu’afficher son mépris pour la volonté populaire. Elle sème les graines d’une instabilité politique dont elle fera à terme elle-même les frais. L’ASLOCA saura, quant à elle, rester dans son rôle. Elle se prépare déjà à défendre les intérêts d’une population à laquelle une grande partie de la classe politique a désormais tourné le dos.