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Entre la théorie du processus de gentrification d’un quartier populaire et son évolution sur le terrain règne tout un univers où chacun prend ses marques au côtoiement du quotidien de ses voisins.
«J’ai immédiatement senti que nous avions notre place, ma femme et moi, dans cette rue populaire de Lausanne, raconte Blaise, 55 ans, de profession libérale. Nous vivions à la campagne dans une grande maison, mais nous ressentions depuis un certain temps le besoin de vivre dans la ville, de nous rendre au travail à pied sans devoir affronter le trafic toujours plus intense aux heures de pointe. Et puis quel luxe de pouvoir rentrer chez soi entre midi et deux heures. Cela n’a pas de prix.» Comment s’est-il senti accueilli? «Très bien, affirme-t-il. Que des regards respectueux et souriants. Des échanges sympathiques aussi, peut-être parce que nous menons une simple vie de famille. Nous nous sommes aussi mis au diapason en fréquentant l’épicerie, le pressing et la boulangerie du quartier. Et puis nous avons renoncé à notre deuxième voiture et, comme tout le monde, nous laissons notre voiture dans la rue munie d’un simple macaron.» Ayant le contact facile, Blaise admet avoir eu une petite explication avec une voisine qui ne semblait pas apprécier que les chambres de bonne au-dessus de son appartement aient été transformées en un vaste logement au loyer plutôt élevé pour le quartier. Elle a d’ailleurs déménagé. Victime de la gentrification? Le mot semble excessif, bien que le processus semble tout de même avoir démarré avec quelques transformations...
Plus loin dans la rue, Eva, jeune cadre dans une grande entreprise, vient elle aussi de s’installer dans le quartier. «Je n’ai pas tellement eu le choix, quand on doit se loger on prend ce que l’on trouve, mais franchement il m’arrive de rêver d’un havre de paix et de silence quand je rentre le soir. L’été tout le monde reste jusqu’à pas d’heure sur les balcons et l’hiver tout le monde semble allumer sa radio aux aurores, surtout le week-end. Et puis il y a ces odeurs de nourriture et la cage d’escalier jamais vraiment propre. Franchement, quartier populaire d’accord, mais ce serait bien si l’environnement s’améliorait un peu. Parfois je n’en peux plus!» Pas évidente, la proximité de la mixité dans la réalité du quotidien.
La gentrification, ou l'embourgeoisement urbain
Processus de transformation du tissu urbain, la gentrification est un anglicisme provenant de gentry (petite noblesse). Il s’agit de la colonisation d’un espace de la ville par des habitants plus aisés avec une tendance à en modifier l’environnement. Certains préfèrent parler de mixité sociale. Cela dépend de l’ampleur du phénomène et du nombre de nouveaux arrivants dans le quartier.