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Dans les cantons qui connaissent l’avis de fixation du loyer initial, les motifs de la fixation de celuici doivent figurer sur l’avis. Cela même si le logement n’a jamais été loué auparavant.
Pour tout nouveau contrat de bail – même si l’appartement n’était pas précédemment loué – le bailleur doit remettre au locataire un formulaire de fixation du loyer initial prévu à l’art. 270 al. 2 du Code des obligations. Ce formulaire rappelle au locataire son droit de contester le loyer initial dans un délai de trente jours dès réception de la chose louée et d’en demander la diminution s’il l’estime abusif.
A l’heure actuelle, ce formulaire n’est obligatoire que dans les cantons de Fribourg, Genève, Neuchâtel et Vaud en Suisse romande ainsi que dans les seuls cantons suisses alémaniques de Nidwald, de Zoug et de Zurich.
Les locataires des autres cantons peuvent également contester le loyer initial dans un délai de trente jours mais malheureusement aucun formulaire officiel ne les en informe.
Montant du loyer précédent
Le formulaire de fixation du loyer initial doit mentionner le nom de l’ancien locataire ainsi que le loyer qu’il versait. Le Tribunal fédéral (TF) vient de confirmer que ce formulaire doit également contenir une motivation comme c’est déjà le cas pour le formulaire de hausse de loyer prévu à l’art. 269d du CO. Cette disposition précise par ailleurs que les majorations de loyer sont nulles lorsque les motifs ne sont pas indiqués.
Loyer fixé par le juge
Le TF a jugé que, lorsque la formule officielle de fixation du loyer initial n’indique pas le loyer du précédent locataire ou les motifs de fixation du loyer, celui-ci est nul. Le locataire peut donc saisir en tout temps la Commission de conciliation pour que le loyer soit fixé par le juge.
Ce devoir de respecter la forme imposée par la loi a un caractère impératif et absolu, ce qui signifie que, même si le locataire avait appris par une autre voie le montant du loyer versé par l’ancien locataire, l’absence de cette mention dans la formule officielle «constitue un vice dirimant » selon les termes du TF, à savoir un vice qui entraîne la nullité de la fixation du loyer.
Aucune pression du bailleur
Dans un cas jugé par le TF le 15 juin 2016, l’avis de fixation du loyer initial ne mentionnait aucun motif alors que le loyer initial était plus élevé que celui payé par le précédent locataire. Il était simplement mentionné «loyer déterminé d’entente entre les parties et sur la base du loyer précédent ». Le TF, et avant lui les tribunaux genevois, a constaté la nullité de la fixation du loyer initial. Le TF précise qu’il n’est pas pertinent de plaider que les locataires auraient accepté cette hausse de loyer qui serait consensuelle et qu’en conséquence il n’aurait pas été nécessaire d’utiliser la formule officielle; la jurisprudence requiert que le locataire ne fasse l’objet d’aucune pression de la part du bailleur.
50 000 francs remboursés au locataire
Pour la petite histoire, on précisera que le loyer de l’appartement de trois pièces, cuisine comprise, avait été fixé à 2250 francs par mois depuis le 1er avril 2010. Les locataires ont demandé une baisse de loyer de 6,8% à partir du 1er avril 2013 vu la diminution du taux hypothécaire, baisse de loyer refusée par la bailleresse. Les locataires ont alors consulté l’ASLOCA Genève, qui a découvert la nullité de la fixation du loyer initial et saisi la Commission de conciliation le 31 janvier 2013.
Finalement, le loyer a été réduit à 1600 francs par mois, soit près de 30% de moins à partir du 1er avril 2010. Les locataires vont ainsi récupérer après cette procédure une somme de près de 50 000 francs (arrêt du 15 juin 2016 dans les causes 4A 599/2015 et 4A 603/2015).
Il vaut la peine de relire son bail et l’avis de fixation du loyer initial pour voir si ce dernier a été correctement rempli. Une absence de motivation dans ce genre d’avis officiel est une petite erreur, mais elle peut rapporter gros au locataire.